Une Autre Histoire

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Le voyage d'exploration ne consiste pas
à rechercher des terres nouvelles,
mais à voir avec un regard neuf.
Marcel Proust.

Siècle bleu – À la recherche d’un récit positif du XXIe siècle

Les deux premiers tomes de la saga Siècle bleu parus en 2010 et 2012 racontaient l’aventure d’un petit groupe de femmes et d’hommes qui, à leur échelle, voulaient changer le monde. Malgré eux, ils se retrouvèrent au cœur d’une affaire d’Etat et devinrent l’objet d’une traque internationale. Leur combat devint le symbole de l'opposition entre deux visions du monde. À l’issue d’une révolution pacifique mondiale de 28 jours, qui conduisit à l’irréparable mais aussi à une révélation merveilleuse, l’humanité s’éveilla et franchit un grand pas vers l’avènement d’une conscience planétaire. L’état d’esprit dominant changea, laissant entrevoir la possibilité d’une autre histoire.

Pour les tomes suivants, mon intention était justement de raconter cette autre histoire possible pour notre siècle, le Siècle bleu, tel que rêvé par mon personnage principal dans le premier tome.

Je suis certain que ce siècle, si noir, pourrait devenir bleu.
Il suffit de peu de choses, juste que nous le voulions ensemble.
Cet effort doit s’inscrire dans la durée.
Un siècle par exemple.
Le temps nécessaire pour bâtir une cathédrale.
L’humanité doit inscrire son action dans un temps qui la dépasse.
C’est ça : rêvons d’un Siècle bleu.
Celui de la réconciliation entre les Hommes, la Terre et le Cosmos.
Celui qui permettra à nos enfants de continuer à vivre normalement.
Celui dont les générations futures pourront être fières.
Pensons à leur joie si nous réussissons.
Et à notre honte si nous échouons.
Nous pouvons réussir.

Pour la suite, il me fallait donc un récit réaliste qui mette en scène cette transition réussie, avec ses fantastiques espoirs mais aussi ses dangers, de façon à baliser cet avenir qui fait peur alors qu’il devrait nous enthousiasmer.

L’enjeu du troisième tome était décrit dans ces quelques phrases de l’épilogue d’Ombres et Lumières :

Les Ombres viennent de subir un sérieux revers. Mais elles sont terriblement intelligentes et ont commencé à se reconstituer. Partout, des hommes sous l’emprise des forces prédatrices réfléchissent à la façon de mettre fin au rêve du Siècle bleu. Elles se préparent à lutter pour que nous échouions. Le combat sera long et les occasions de fléchir seront nombreuses. Le rêve de Paul est l’aboutissement de vingt mille ans d’efforts pour hisser l’humanité au stade où elle se trouve maintenant. Il faut à tout prix protéger ce rêve. Nous ne sommes qu’au début du Siècle bleu, au début de notre combat. Les Ombres doivent échouer et nous avons besoin d’aide. Abel, tu dois nous rejoindre.

Ce récit du nouveau monde, je ne l’avais qu’en partie car le monde évolue vite pour le meilleur et pour le pire. Depuis près de trois ans, j’ai donc repris mes recherches pour recenser et analyser les forces, concepts, valeurs et tendances qui pourraient marquer les vingt prochaines années positivement ou négativement, afin de constituer la base documentaire sur laquelle s’appuiera la suite de la saga Siècle bleu.

À la rencontre des acteurs de la transition

Cette plongée dans le présent et le futur a été vertigineuse. J’ai alterné entre des phases d’abattement profondes tant le monde peut paraître inquiétant mais aussi d’immenses joies devant l’incroyable créativité et beauté du génie humain qui nous réserve des surprises insoupçonnées. Lors des conférences que je donnais ou des émissions de radio où j’intervenais, j’ai pu remarquer l’intérêt pour ces thèmes mais aussi les questionnements qu’ils suscitaient.

Cette période de lectures, de rencontres, de réflexion, de discussions m’a fait penser aux théories fractales de Mandelbrot, ma première passion en mathématiques. Plus je zoomais sur un problème, plus je trouvais de nouvelles zones à explorer d’une grande richesse, rendant cette quête quasi infinie. Ces recherches ont commencé à accaparer tout mon temps libre, toutes mes nuits. Comme souvent lorsque l’on ne sait pas ce que l’on cherche, il faut accepter de s’égarer, de se perdre, afin d’être ouvert aux découvertes inattendues. La fameuse sérendipité.

Même perdu, j’essayais de garder en tête les questions qui m’obsédent depuis toujours et qui me servent de cap : qu’est-ce qui pourrait changer le monde ? Est-ce que ça marche vraiment ? Comment financer ces métamorphoses ? Par où commencer ? Y a-t-il une origine commune à tous nos problèmes ? Pourquoi l’homme se comporte ainsi ? Pourquoi fait-il du mal aux autres et à la Terre ? Qu’est ce qui pourrait rapprocher les hommes ? Comment réduire drastiquement cette frénésie ? Où et comment appuyer sur le système pour obtenir un effet de levier maximum ? Quels nouveaux modèles d’organisation pour les sociétés humaines ?

C’est avec ces questions en tête que je suis parti à la rencontre depuis trois ans des acteurs du mouvement de transition et de réinvention. Scientifiques visionnaires, jardiniers et agriculteurs éclairés, sociologues, philosophes, créateurs d’entreprises, fondateurs de mouvements et d’ONG, écrivains, DJs, chamanes, étudiants passionnés, utopistes, journalistes engagés, libraires résistants, méditants, astronautes, prospectivistes, marginaux, industriels, communicants, grands sages, femmes et hommes politiques, militants musclés, artistes éclairés, négociateurs climatiques, économistes…  

Comme certains d'entre eux avaient lu mes romans, cela a créé dès le départ de fortes affinités. J’ai pu obtenir des témoignages privilégiés de leurs espoirs, de leurs doutes, de leurs peurs, de leurs desillusions, de ce qui les bloque pour avancer mais surtout de leurs rêves. J’ai pu me rendre compte avec eux des forces et faiblesses actuelles de ce mouvement de transition, de ce qu’il faudrait pour l’accélérer et de ce qui surtout pourrait freiner la frénésie humaine. J’ai enfin pu tisser de belles amitiés ce qui était pour moi le motif premier dans mon aventure d’écrivain. Se sentir moins seul. Créer des liens.

Pour complèter la vision, je me suis aussi approché – plus discrètement, par personnes interposées ou en lisant leurs écrits – de ceux qui oeuvrent consciemment ou malgré eux à la destruction du monde pour comprendre leur rapport à l’argent, au pouvoir, aux ressources et aux autres humains. J’ai toujours aimé regarder le soleil en face, quitte à me brûler les yeux. Il est pour moi fondamental de comprendre leur logique, leurs motivations, leurs idéologies, leurs peurs et leurs craintes car ce sont eux qui empêchent le monde de changer. J’aurais aimé me rapprocher encore davantage d'eux pour comprendre l’enfant qu’ils ont été et la part de celui-ci qui demeure en eux, mais la prudence ne me l’a pas souvent permis. Je reste persuadé que chaque homme possède une grande part de bonté et que c’est en comprenant ses soi-disants « ennemis » que l’on peut en faire des alliés. « La ligne de partage entre le bien et le mal ne sépare ni les Etats ni les classes ni les partis, mais qu'elle traverse le coeur de chaque homme et de toute l'humanité. » écrivait Alexandre Soljenitsyne dans L’Archipel du Goulag.

Pourquoi un essai ?

À l’automne 2014, face au foisonnement d’idées récoltées, j’ai ressenti le besoin de faire une synthèse de ces explorations afin d’y voir plus clair, d’accéder à une vision plus globale, mais surtout de commencer à esquisser ce futur positif que je souhaite à tous et plus particulièrement à nos enfants (et aux miens en particulier évidemment !).

Au départ ce n’étaient que quelques pages, puis le puzzle entre des pensées très éloignées, récentes ou parfois anciennes, a commencé à s’assembler. En réunissant mes notes, il m’a semblé intéressant de partager avec vous ces réflexions, pour certaines connues et pour d’autres je l’espère un peu moins. J’avais en tout cas pour moi besoin de coucher tout cela sur papier pour l’assimiler, le digérer et le visualiser.

Ce n’est donc pas un roman que vous avez sous les yeux mais un essai sur des pans du monde qui vient et surtout sur celui qu’il conviendrait de faire advenir. Les lecteurs qui attendaient le troisième tome seront certainement un peu déçus, mais j’espère que ce travail les intéressera et les éclairera un peu sur notre temps. Comme pour la saga Siècle bleu, j’ai essayé de rendre accessible des notions parfois complexes afin de redonner l’espoir tout en mettant en garde contre les erreurs et illusions qui pourraient nous empêcher de réussir.

L’écriture de cet essai relève enfin d’une volonté personnelle croissante de m’engager en fournissant des outils plus explicites qu’un récit romancé. Du fait des prises de positions explicites, ce texte fera davantage débat que les romans, mais c’est aussi l’objectif de confronter ainsi les points de vue.

Pourquoi mettre des pans de cet essai maintenant en ligne ?

La dureté de l’actualité (notamment depuis les attentats de Charlie Hebdo), le cynisme dans les relations internationales, l’imminence du grand rendez-vous planétaire de la conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP21) à Paris au mois de décembre 2015 mais aussi la découverte d’une myriade d’initiatives porteuses d’espoir m’ont conduit à vouloir partager les quatre premiers chapitres de l’essai avec le plus grand nombre tout au cours de novembre 2015. Cela permettra aussi d’agrémenter le texte d’images, de liens vers les textes, vidéos, films qui m’ont accompagné dans cette réflexion. Ce livre est forcément un résumé et avec ces liens vous pourrez poursuivre à votre tour aussi l’exploration dans les directions qui vous intéressent.

Au cours des rencontres avec vous, chères lectrices et chers lecteurs, j’ai pu admirer la richesse de vos réflexions. J’ai donc eu l’envie d’une œuvre ouverte, d’un échange plus direct avec vous et entre vous, afin de confronter et d’enrichir nos points de vue. Venez débattre sur BLUE, le réseau social de la communauté Siècle bleu. Inscrivez-vous ! Nous organiserons des débats tout au long de la plubication de ces textes.

Une autre histoire pour changer de regard sur le monde et se mettre à agir

Lorsque l’écriture de l’ensemble sera achevée (il me reste encore un bon quart à écrire), ce travail donnera lieu à la publication d’un essai papier complet en 2016 (je n’ai pas encore recherché d’éditeur, avis aux intéressés). Le projet est néanmoins assez titanesque et vos encouragements seront comme toujours très utiles pour le mener jusqu’au bout.

Après celà je reviendrai à mon objectif premier qui reste d’agencer ces éléments dans un grand récit d’aventure qui raconte un futur positif et crédible. En effet, la fiction a l’immense supériorité par rapport à l’essai de pouvoir émouvoir, prêcher des non-convaincus et surtout de proposer une contre-narration alternative aux récits sclérosants des partisans du statuquo et des déclinologues.

Ecrire ce troisième tome me démange, retrouvez les personnages que j’ai laissés depuis plus de trois ans aussi. Afin de vous faire patienter, chères lectrices et chers lecteurs, vous trouverez dans cet essai une première tentative, une nouvelle intitulée « Une autre histoire » qui préfigure ce que sera le prochain roman. Une autre histoire pour changer de regard sur notre monde qui détient les germes de tant de belles idées.

Cette nouvelle sera mise en ligne fin novembre, juste avant l’ouverture de la COP21. Elle paraîtra avant celà dans un ouvrage collectif que je vous recommande : Nouveaux mythes, nouveaux imaginaires pour un monde durable, le jeudi 12 novembre 2015.

Le mardi 2 décembre 2015, je publierai également une autre nouvelle sur ce thème dans un cahier spécial du journal Libération « Climat, les écrivains racontent 2050 » avec quelques autres sommités littéraires.

Le manifeste bleu

Dans mon roman Ombres et Lumières publié en 2012, l’astronaute Paul Gardner élaborait sa Révolution bleue et publiait un manifeste, sorte de programme de travail pour l’édification du Siècle bleu. Cet essai explore seulement une partie de ces questions et pose un nombre de questions encore plus nombreuses. Il faudra évidemment un grand effort collectif et des expérimentations multiples pour parvenir à en faire le tour. Ces réflexions n’ont donc que l’humble ambition de participer à cet élan. Le Siècle bleu sera avant tout un formidable siècle d’invention et de réinvention !

Bonne lecture et surtout venez participer à la réflexion et aux débats sur BLUE, le réseau social de la communauté Siècle bleu !

Le Manifeste bleu

Malgré ma faible énergie, j’ai essayé de clarifier le vaste programme de la Révolution bleue.

Cette révolution pacifique n’implique pas un retour à l’âge de pierre. Au contraire, elle nécessitera toute la créativité de notre espèce tant les défis pour définir enfin une organisation harmonieuse des sociétés humaines sont inédits.

L’humanité entière devra se déclarer prête pour cette transition. Nos institutions internationales, avec leur fonctionnement kafkaïen, sont aujourd’hui en panne. Il nous faudra donc imaginer d’abord un mode de gouvernance mondiale efficace, où la tolérance et le respect entre les peuples l’emporteront sur la défense des intérêts particuliers.

Il faudra mettre fin à la dictature du court terme et des échéances électorales. Les grandes décisions devront échoir à des représentants de nos peuples, choisis pour leur sagesse et leur vision, et guidés par les exigences simples de la vie dans un petit monde bleu. L’humanité pourra alors s’atteler aux grands chantiers qui l’attendent.

Il faudra ralentir et prendre le temps de réfléchir en profondeur à l’organisation de nos vies et de nos sociétés. Lorsque l’on regarde la Terre depuis l’espace, les mécanismes qui régissent la marche du monde paraissent en effet complexes et absurdes.

Il faudra maîtriser notre démographie et en gérer les conséquences économiques. Certaines populations y sont parvenues, en donnant par exemple davantage de droits aux femmes. Ces nations pourront nous faire bénéficier de leur expérience et de leurs erreurs.

Il faudra nous interroger à nouveau sur les concepts philosophiques fondamentaux de propriété et d’État, sources de toutes les divisions. Il faudra revisiter Hobbes, Locke, Rousseau ou Marx, et pousser davantage leurs réflexions en tirant les leçons du communisme et du capitalisme.

Il faudra inventer de nouveaux concepts économiques compatibles avec les limites de notre planète, et répartissant équitablement les richesses entre les peuples et les générations.

Il faudra réunir les peuples, comme au lendemain d’une guerre, pour statuer sur les dettes contractées. Et empêcher que ce fléau ne se développe à nouveau.

Il faudra veiller à ce que de nouveaux baobabs ne poussent pas. Ce sera la tâche de chacun, et également d’un conseil de sages chargé d’évaluer tout processus susceptible de se développer exponentiellement, en évaluant, comme les Iroquois, son impact sur sept générations. Nommons-le « Deep Thinking Institute ».

Il faudra s’interroger à nouveau sur les droits de l’homme, mais surtout sur ses devoirs.

Il faudra réfléchir à l’organisation de la famille, renforcer les liens entre les générations afin d’éviter l’isolement des plus âgés et des plus jeunes, en s’inspirant de ce qui existe déjà dans de nombreuses régions du monde.

Il faudra revoir l’éducation en enseignant à nos enfants les notions et les valeurs nécessaires à la vie sur une petite planète.

Il faudra repenser l’organisation des villes pour qu’elles deviennent des lieux de solidarité et de convivialité.

Il faudra réduire notre consommation d’énergie, mettre au point de nouvelles sources renouvelables qui soient capables de subvenir à nos besoins sans consommer de matières rares. Cela nécessitera de vraies ruptures technologiques.

Il faudra abandonner le concept de poubelle, si déresponsabilisant, qui a fait de notre civilisation une véritable machine à produire des déchets.

Il faudra passer en revue la conception de tous les objets que nous utilisons afin qu’ils soient totalement recyclables et que les services rendus par la Nature y soient pris en compte.

Il faudra refonder notre médecine en établissant une synthèse des savoirs.

Il faudra repenser complètement notre alimentation et notre agriculture.

Il faudra...                                                                               

La liste pourrait être allongée indéfiniment. Les défis à venir sont innombrables.

Nous aurons besoin d’un nouveau Siècle des lumières, dans lequel, cette fois-ci, l’homme éclairé ne sera plus aveuglé par la Raison, mais davantage conscient de son pouvoir et de ses limites. Cette philosophie des lumières laissera aussi de la place au merveilleux.

Pour y parvenir, nous aurons besoin de l’aide de chaque être humain, et en particulier de celle des peuples premiers, qui ont su conserver un lien avec la Nature et le Cosmos, et qui ont déjà trouvé des réponses à la plupart des questions listées précédemment.

Nous aurons besoin de toutes les espèces végétales et animales embarquées sur notre grande arche. Il faudra écouter leurs enseignements et développer le biomimétisme. Il faudra que l’Homme retrouve sa place dans la Nature, qu’il réapprenne à la respecter et à s’en émerveiller. La biosphère n’est pas un substrat dans lequel nous puisons mais un tout harmonieux auquel nous appartenons.

Nous aurons besoin des artistes et des humoristes pour qu’ils embellissent, questionnent, éclairent et égayent notre futur.

Nous aurons besoin des inventeurs d’utopies pour qu’ils imaginent les voies possibles pour ce Siècle bleu.

Nous aurons besoin des bras et des rêves de tous. Les rêves d’un seul homme peuvent changer le monde, alors imaginez ceux de plusieurs milliards d’individus !

Au travail, maintenant !
Rêvez et vive la Révolution bleue !
À demain.

Paul Gardner.

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