Siècle bleu 2000

Premier Jour - Un Dimanche de Pâques

Ile de Pâques, 5 avril 1722.

En cette soirée du dimanche de Pâques, l'Amiral hollandais Jacob Roggeveen et son équipage accostent sur l'île qui gardera pour nom le jour de sa découverte. Les étranges statues géantes dressées sur les rivages de l'île désertique paraissent être l'œuvre d'une civilisation avancée mais les indigènes qu'ils rencontrent ne semblent pas pouvoir être les auteurs de telles merveilles. Il faudra plusieurs siècles pour percer les mystères de l'île la plus isolée de la planète. Située à quatre mille kilomètres des côtes chiliennes et de Tahiti et à deux mille kilomètres de l'île la plus proche, elle est littéralement perdue dans l'immensité de l'Océan Pacifique.

L'île fut colonisée pour la première fois au cinquième siècle de notre ère par une tribu polynésienne sillonnant le Pacifique. A leur arrivée, l'île vierge possédait une végétation et des ressources en abondance. Comme il n'était de toutes façons pas envisageable de repartir, les polynésiens s'y installèrent et rapidement l'étonnante civilisation des statues moaï prit son essor. Les habitants étaient répartis alors en trois castes : les paysans, les sculpteurs et les prêtres. Compte tenu des dimensions confortables de l'île et des ressources disponibles, les membres des différentes castes vécurent en bon ménage et la population s'accrût de manière régulière. On estime que de la cinquantaine d'arrivants initiaux, la population s'éleva jusqu'à plus de dix mille habitants au dix-septième siècle. Ce développement florissant ne se fit malheureusement pas en harmonie avec les ressources naturelles de l'île. La totalité des arbres de l'île fut abattue pour permettre l'acheminement des massives statues jusqu'au rivage, les sols dénudés furent lessivés par les pluies et il devint un jour impossible de nourrir la totalité de la population. L'absence totale d'arbres rendait impossible la construction d'embarcations et donc la fuite vers de nouveaux rivages.

A l'apogée de leur civilisation, les Pascuans, prisonniers au milieu du Pacifique, venait de signer aveuglement leur arrêt de mort et celui des générations futures. Des luttes terribles explosèrent entre les paysans et les gardiens du culte moaï qui finirent par s'entre-dévorer. Le déclin total de la civilisation pascuane s'en suivit. Les statues dressées furent tour à tour couchées par les survivants souhaitant effacer cette civilisation absurde de leur mémoire. De la nature florissante, il ne restait plus qu'une île désolée. Les Pascuans étaient les premiers à comprendre la difficulté de vivre et de se développer dans un monde fini duquel on ne peut s'échapper.

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